Courts métrages

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Autant les étendues d’« Écrans » se déclinent en neuf œuvres murales de grands formats éphémères, autant les 13 « Courts métrages » du présent solo défilent en pièces permanentes encadrées de moyen format (40 x 60’’). Encore du papier recyclé ? oui, mais quel étalonnage.

C’est indubitable, les immenses « Écrans » du musée disparaîtront pour toujours lors du démontage (dé-montage). Aucun écrin envisageable pour les conserver dans leur majestueux état. « Écrans » déchirés, éteints à jamais.
Avec la nouvelle série intitulée judicieusement « Courts métrages », l’artiste bricoleur-prestidigitateur spécialiste du plis, du replis et des jeux de renvois nous surprend à nouveau. Plutôt que de calquer l’expérience précédente, il préfère REmixer, malaxer, métisser donc compléxifier encore plus le traitement de ses images-source. La nouvelle combinaison-synthèse qu’il nous offre à la vue aujourd’hui mélange cette fois carnets de comptable, journaux espagnols, bottin des Pages Roses… aux affiches, carnets, cahiers à colorier, Mangas, cartes routières, billets de Loto-Québec. Les effets spécieux de ses nouveaux films de friction sont plus manifestes. Avec pour leurre visuel comme seul mandat, il fusionne et synthétise les sources précédentes et ses récentes trouvailles pour développer des tracés très graphiques et autres entrelacements de fines lignes inlassablement répétitives.
La superposition de bandelettes horizontales est issue du même geste et il nous appert tout aussi bien comme une métaphore du « film » cinématographique. Plutôt que le bout à bout du monteur, le collagiste-matiériste Fortin préfère le plan en côte à côte, la superposition à l’horizontal et surtout le plaisir du fil(m) à retordre. Dans le continuum de sa facture moderniste, conceptuelle voire aux accents Optical Art et zen, l’effet est cette fois par contre perturbé cognitivement par la transposition, la reformulation, la traduction d’un vocabulaire-système volontairement SURbrouillé.
Rappelons-le, le (mé-)tissage chez Fortin en appelle au tricot, au patchwork, à la courte-pointe ou encore à la ceinture fléchée (toutes pratiques d’un artisanat inscrit dans le traditionnel). Son « métier d’art » à lui (dextérité et façonnage manuel concentré et répété dans le temps) consiste à effacer toute détectabilité d’information précise pour mieux – comme il se doit dans sa démarche – nous berner. Impossible de syntoniser aucun « Écran », aucun « Court métrage ».
D’aucun a proclamé : « Trop d’informations, c’est comme pas d’information… ». Fortin s’en amuse et ab/use avantageusement de transferts de bobines (fil et film) d’une projection à l’autre entre « arrêts sur image » et « arrêts du temps » (dixit Sandra Grant Marchand). Dans la suite de la sortie (inéluctable) des « Écrans » du musée, on verra sans doute dans cette diffusion de 13 « Courts métrages » inédits une reprise/un Remake. Avec un commentaire esthétique plus lucide sur notre univers de l’hyper-communication dans lequel on ne sait plus trop à quel saint se vouer.

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Whereas the expanses of Écrans give way to nine, large-format, ephemeral murals, the 13 Courts métrages of this show are permanent pieces framed in medium-sized formats (40″x60″). Still on recycled paper? Yes, but what a display!

The immense Écrans at the MACM will most certainly disappear forever after they have been taken down. There is no treasure vault waiting to preserve them in their majestic state. Écrans will be torn apart and forever gone.

With the new series, shrewdly called Courts métrages, the bricoleur/conjurer of folds, double-folds, and playful references surprises us once again. Rather than simply replicating the preceding exploration, he chose to remix, knead together, interweave, thus, to add even more complexity to his source images. The new summary-combo which Fortin today offers us is an arrangement of receipt books, Spanish magazines, listings from the Pink Pages , posters, notepads, colouring books, mangas, road maps, lotto tickets. Indeed, his new “friction films” have more special effects.

With the visual lure as his only mandate, he merges and synthesizes former sources and new discoveries to develop highly graphic traces and other interlacings made up of incessantly repetitive fine lines. The superposition of narrow horizontal strips originates from the same gesture and appears almost as a metaphor for cinematographic film. Rather than the step-by-step method of film editors, the collagist Fortin prefers proceeding side by side, with horizontal superpositions, leaving him, above all, the pleasure of getting to twist film/yarn.

In the continuum of his modernist workmanship, almost conceptual with hints of Op Art and Zen, the effect is, this time, cognitively disturbed by the transposition, reformulation, and translation of a deliberately OVERshuffled vocabulary.

Fortin’s interweaving evokes knitting, patchwork, quilting, or the ceinture fléchée (traditional folkloric Quebec belt) – in short, any traditional, artisan craft. His metier (dexterity as well as concentrated and repetitive manual craftsmanship) consists of removing all traceability of precise information in order to better fool us – in line with his approach.

It’s impossible to synthesize either Écran or Court métrage. As some claim “Too much information is no information”. Fortin has fun with them and knows how to exploit the transfers of spools (thread and film) from one projection to another between “image stops” and “time stops” (from Sandra Grant Marchand; trans.).

After the (inescapable ) release of Écrans at the MACM, the “screening” of 13 new Courts métrages will certainly seem like a remake . However , it promises a more lucid aesthetic commentary on our universe of hyper-communication in which we no longer know which saint to venerate.

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